Médias canadiens : comment ils travaillent et ce qu'ils écrivent sur la Russie et l'Ukraine
Quel genre d'histoires sur leur pays peut-on attendre des journalistes canadiens ? Peut-on les croire ? Découvrez-le dans notre article.
Chaque média est marqué par le caractère national notoire du pays dans lequel il existe — qu'il s'agisse de l'intempérance française, de l'austérité anglaise, de la condescendance américaine ou de la bienveillance canadienne.
De plus, tout média est façonné par les nouvelles qui se produisent autour de lui — ainsi, un journal japonais fictif accorde plus d'attention à la probabilité d'un tsunami qu'une hypothétique station de radio suisse. Et c'est pourquoi les médias canadiens publient tant d'histoires sur les animaux — le fait est qu'il y en a en fait beaucoup qui se passent au Canada.
Quelles sont donc les spécificités des médias canadiens — à part les histoires de castors coincés dans une clôture et de ratons laveurs entrant par effraction dans la maison de quelqu'un ?
Les médias canadiens
Selon une étude réalisée en 2008 par Abby Goodrum et Elizabeth Godot de l'université Ryerson (Toronto), qui ont analysé les bulletins d'information de deux chaînes de télévision canadiennes (CBC publique et CTV privée), les cinq pays les plus cités sont les suivants
- ÉTATS-UNIS ;
- ROYAUME-UNI ;
- Israël ;
- Afghanistan ;
- L'Irak.
Parallèlement, les États-Unis représentaient 44,6 % des émissions de télévision, tandis que le Royaume-Uni suivait avec seulement 8,3 %.
La conclusion est donc simple : les nouvelles canadiennes sont principalement constituées d'histoires locales et de nouvelles des États-Unis voisins, avec peu d'attention accordée au reste du monde. Soit dit en passant, l'abondance des États-Unis dans l'actualité est depuis longtemps une source de préoccupation pour les Canadiens et les autorités. Certaines publications ont même introduit des "quotas canadiens" exigeant des journalistes qu'ils diluent les événements américains avec des nouvelles locales.
En outre, le grand nombre d'immigrants au Canada pose un problème particulier : le fait qu'ils ne reçoivent pas d'informations sur les pays d'où ils viennent et dont le sort est important pour eux. Par exemple, le Canada possède une énorme diaspora chinoise, et la présence de la Chine (et des pays asiatiques en général) dans la couverture médiatique est minime (environ 2,45 %). Cela provoque un mécontentement généralisé dans la société multiculturelle canadienne. Dans une certaine mesure, cependant, ce problème a été résolu grâce aux médias multiculturels — et ce depuis la fin des années 1980, lorsque le gouvernement a décidé pour la première fois de soutenir les médias dans les langues maternelles de nombreuses diasporas.
Néanmoins, les chercheurs qui analysent l'attitude des Canadiens à l'égard des médias à l'ère d'Internet ont constaté une baisse constante de la confiance des Canadiens dans les médias nationaux.
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Selon une étude du professeur Mark Raboy de l'université McGill, la confiance des Canadiens dans toute forme de médias est inférieure à 50% :
- Radio — 50 % ;
- Internet — 47 % ;
- Journaux — 43% ;
- Télévision — 42 % ;
- Magazines — 33% ;
- Les médias sociaux — 13-14%.
Ce qu'ils écrivent sur la Russie et l'Ukraine
D'après ce qui a été dit, il est clair que le Canada n'accorde que très peu d'attention aux pays de la CEI.
L'Ukraine, en raison de ses relations particulières avec le Canada, apparaît de temps en temps dans la presse. L'année dernière, elle était bien sûr liée à l'abattage d'un avion de ligne ukrainien par les autorités iraniennes le 8 janvier 2020, avec 138 Canadiens à bord. L'Ukraine et le Canada ont été étroitement associés à l'enquête initiale sur les circonstances de la tragédie, et la couverture médiatique du processus a accordé une grande attention aux actions de la partie ukrainienne.
Avant la tragédie du 8 janvier, l'Ukraine était présente dans la presse canadienne en rapport avec la coopération militaire entre les deux pays — en particulier, la fourniture d'armes canadiennes sur le territoire de l'Ukraine. En outre, à l'été 2019, le Canada a alloué 45 millions de dollars à l'Ukraine et a rencontré le nouveau président. La visite de trois jours du président ukrainien Zelenskyy a été largement couverte par la presse canadienne.
"Zelensky est venu à Toronto en partie pour apaiser ceux qui doutaient de la capacité de l'acteur qui jouait le président dans la série télévisée à faire le travail dans la vraie vie", écrivait alors le National Post.
Au cours de la visite, Zelenskyy et Trudeau ont annoncé leur intention de signer un accord sur les échanges de jeunes entre les deux pays, qui simplifierait la procédure d'obtention d'un visa pour travailler ou étudier pour une durée maximale d'un an. Depuis lors, d'ailleurs, des progrès ont été réalisés : les pays ont créé un groupe de travail sur l'immigration des Ukrainiens au Canada.
Outre la facilitation des visas, les dirigeants de l'Ukraine et du Canada ont discuté des questions liées aux territoires des républiques populaires autoproclamées de Donetsk et de Louhansk. Il a notamment été déclaré que le Canada n'autoriserait pas les voyageurs munis de passeports délivrés dans le Donbas et la région de Louhansk à entrer dans le pays.
En ce qui concerne la Russie, comme l'écrivent certains immigrants, les notes sont plutôt discrètes et courtes, consistant principalement en des faits et un minimum d'évaluation. A moins que quelque chose de très médiatisé n'arrive — comme l'histoire d'Alexei Navalny, lorsque les médias canadiens ont d'abord publié les nouvelles sur l'empoisonnement, puis les rassemblements et enfin les appels à la libération de l'opposant.
De temps en temps, la Russie apparaît encore dans la presse canadienne à cause de scandales d'espionnage. Par exemple, en 2015, deux jeunes frères canadiens d'origine russe ont été dépouillés de leur citoyenneté canadienne parce que leurs parents se sont révélés être des espions qui s'étaient appropriés l'identité de Canadiens décédés. En mars 2020, une nouvelle histoire d'espionnage est apparue dans les médias : cette fois, l'épouse russe d'un ancien fonctionnaire canadien a été déchue de sa citoyenneté pour son association avec le FSB dans les années 1990.
Dans l'ensemble, le Canada ne ressent aucune émotion envers la Russie. Du moins, pas avant la fin des années 2010. Et cette attitude médiatique reflète l'attitude des Canadiens ordinaires envers la Russie et l'Ukraine. Le plus souvent, ils connaissent peu ces pays et ne peuvent donc pas se faire une opinion particulière sur les événements qui s'y déroulent.
Cependant, la Russie apparaît souvent dans les nouvelles en rapport avec une activité extrêmement importante pour les Canadiens. Le hockey est la fierté du Canada et son point sensible. Toutes les finales, les matchs à élimination directe et les autres événements dramatiques de la vie du hockey sont pris très au sérieux ici. Par conséquent, tout match contre l'équipe nationale russe est commenté avec beaucoup d'émotion, mais non sans respect pour la compétence des joueurs.
Les médias canadiens n'oublient pas non plus la relation particulière du président russe avec le hockey, qui suscite apparemment une certaine sympathie.
"Poutine a fêté son 63e anniversaire avec son habituel coup pour son argent. Le président russe a joué dans un match de hockey amateur aux côtés de légendes telles que Vyacheslav Fetisov et Pavel Bure, marquant personnellement sept buts", ont écrit les médias canadiens en 2015.
Un autre sujet qui apparaît périodiquement dans la presse canadienne est l'Arctique. Comme nous le savons, outre le Canada, le Conseil de l'Arctique comprend la Russie, le Danemark, la Finlande, l'Islande, la Norvège, la Suède et les États-Unis. Ainsi, de temps en temps, lorsque les puissances du Nord décident de diviser à nouveau l'Arctique, la Russie apparaît dans les nouvelles canadiennes.
Bien sûr, les tensions croissantes autour de la Russie ces dernières années, causées par la guerre en Ukraine et d'autres événements, ne pouvaient pas ne pas être reflétées dans les reportages des médias canadiens.
En particulier, l'explosion de 2019 sur un site d'essai militaire près de Severodvinsk a donné à la plupart des médias canadiens l'occasion de commenter non seulement l'état du complexe militaro-industriel russe, mais aussi la politique russe en général au cours de la dernière décennie.
Ainsi, l'un des plus grands journaux canadiens, The Globe and Mail, a fait part de ses craintes que les ambitions du leader russe, combinées au vieillissement de l'arsenal de missiles du pays (y compris les armes nucléaires), n'aient des conséquences désagréables pour le monde, que ce soit sous le président actuel ou après son départ.
En outre, l'incident sur le site d'essai a été mis par le journaliste sur le même plan que l'accident de Tchernobyl de 1986. D'autres médias canadiens ont exprimé des préoccupations similaires sur les processus politiques en cours en Russie.
Pour résumer, il faut dire que la presse canadienne ne ressent pas d'amour ou de haine particulière envers les pays de la CEI, comme elle le fait envers la plupart des autres pays. A part les Etats-Unis, mais ces relations méritent un grand article séparé.